Jean-Louis, auteur de la page.
Il existe plus d’une douzaine de systèmes différents développés
sur le principe du concertina. Le premier de tous c’est l’english, uni-sonore
mis au point dès les années 30 (1830 !) et répandu
depuis 1850. D’autres, plus ou moins diffusés l’ont suivi. Alors
pourquoi l’Anglo, bi-sonore est il dominant dans la musique trad. Irlandaise
? Les autres systèmes y-ont-ils leur place ? Peut jouer de l’irlandais
sur un english ? Ai je une chance de rencontrer des englishistes irlandophiles
?
A toutes ces questions je répondrai : pourquoi croyez vous que
je m’amuserais à insérer une rubrique dans ce site si la
réponse était non.
L’anglo-german concertina, injustement traité de diatonique,
a trouvé un terrain favorable en Irlande pour au moins trois raisons
:
1 – économiques : l’instrument qui débarque en Irlande
à la fin du 19ème siècle est un instrument bon marché.
Si vous ne vous êtes pas étranglé (de rire ou de colère)
en lisant ce qui précède, c’est que vous êtes pas encore
renseigné sur les tarifs pratiqués aujourd’hui ! – En revanche
les modèles proposés à l’époque, plus rustiques
et plus simples à fabriquer, ont un avantage sur les autres systèmes,
english ou duet. Il s’agit le plus souvent de modèles limités
à deux rangées. Noël Hill lui même a appris sur
un deux rangées dont jouait sa mère. Jacqueline McCarthy
joue encore aujourd’hui sur ce type de concertina.
2 – géographiques : la pratique du concertina s’est développée
dans les régions irlandaises proches des ports où les anglo
« bon marché » étaient importés : Galway,
Cork, Waterford…
3 – sociologiques : le concertina est devenu rapidement l’instrument
des femmes, dans les familles où les hommes jouaient des uillean
pipes, du violon…C’est exactement ce qu’avait prévu son créateur,
Charles Wheatstone, en commercialisant une nouveauté destinée
à une clientèle qui recherchait un instrument de complément
pour jeunes filles de bonnes familles. Scoop : Wheatstone n’était
pas seulement un génial inventeur c’était aussi un champion
du marketing. Voilà une théorie qui gagnerait à être
développée et qui prouve en tous cas qu’on n’a pas peur de
ce qu’on affirme sur le site concertina.free.fr !
économie, géographie, sociologie…ne venez pas dire en plus que ce site manque de sérieux
quels autres types de concertina peut on rencontrer ?
-l’English – le modèle de base (treble) possède 48 boutons
également et judicieusement répartis des deux cotés
: à la main gauche toutes les notes situées sur les lignes
des portées musicales, à la main droite celles situées
entre les lignes. Auprès de chaque note naturelle, son altération,
dièse ou bémol. L’english se caractérise par sa disposition
des anches en cercle qui lui vaut un son inimitable et une tringlerie compliquée.
C’est l’un des rares instruments de musique qui convienne aussi bien aux
droitiers qu’aux gauchers. De mon point de vue c’est le plus beau, opinion
que vous n’êtes pas obligé de partager, sauf si vous avez
acheté un machin à deux rangées et à la déco
rouge fluo avec soufflet à petites fleurs au bazar du coin.
-Le Duet – plus exactement, les Duets, instruments uni-sonores conçus
sur le même principe que l’accordéon chromatique, c’est à
dire permettant de jouer la mélodie à la main droite et un
accompagnement à la main gauche : quatre systèmes principaux
sont connus. Le premier à porter le nom de son inventeur est le
McCann ; utilisé par les artistes de music hall anglais de la belle
époque, ces instruments sont généralement assez volumineux
ce qui les rend plus difficiles à utiliser en musique trad. Le second
système baptisé Crane ou Triumph semble avoir été
l’apanage de l’armée du salut. On en trouve quelques exemplaires
aux mains de musicos français. Le Jeffries a été mis
au point par un fabriquant d’anglos. Bien que chromatique, il a la particularité
d’être bâti autour d’une tonalité, ce qui lui vaut la
réputation d’être quasiment injouable dans les autres. Enfin,
un dernier système a été mis au point plus récemment
par Brian Hayden; il est très peu répandu.
Et encore d’autres…en faisant le tour des sites consacrés à l’instrument vous découvrirez le Chemnitzer, cousin du bandonéon, dont le nom évoque son origine germanique. Vous rencontrerez aussi quelques boites à soufflet aux origines diverses et aux doigtés zarbis. Mais il est un instrument qui mérite une attention plus particulière parce que plus proche, dans l’esprit, du concertina irlandais : c’est le système « franglo ». En fait il s’agit d’une adaptation du clavier d’un accordéon diatonique deux rangées sur la technologie propre au concertina. Réalisé à l’origine par Colin Dipper pour Emmanuel Pariselle, le franglo a fait quelques adeptes dans l’hexagone.
Peut on utiliser tous ces instruments pour jouer de la musique irlandaise
? Cette fois je réponds ouvertement oui, et j’apporte des preuves
:
D’abord, j’en joue. Pas depuis aussi longtemps que le laisse croire
la légende de la photo sur ce site, mais suffisamment pour être
capable d’aller régulièrement m’enfermer dans la pénombre
enfumée d’un débit de boissons mousseuses servies à
la pinte, avec quelques autres fêlés qui s’escriment à
placer leurs airs préférés au milieu des rires sonores
et des éructations alcoolisées de fêtards qui auraient
probablement préféré que le patron laisse la télé
allumée pour pouvoir suivre le match de foot. En gros, on appelle
ça une session !
Mais ça n’est pas suffisant comme preuve ; aussi vais-je citer
plusieurs témoins dignes de foi dont vous pourrez consulter les
œuvres. Discographie sommaire, donc :
Pour commencer, celui à qui je dois mon intérêt
pour le concertina, Alistair Anderson. Que ce soit en solo ou avec le groupe
High Level Ranters, Alistair a été pendant trois décennies
le meilleur représentant de l’english concertina. Son répertoire
du Northumberland est très influencé par les musiciens irlandais
émigrés. A. Anderson a en particulier appris de nombreux
airs du flûtiste John Doonan.
A écouter : traditionnal tunes – Front Hall FHR 08
Concertina workshop – Topic 12TFRS501
Aujourd’hui retiré de la scène, Alistair Anderson dirige
l’école de musique traditionnelle Folkworks. En 2003, il a collaboré
avec la tromboniste Annie Whitehead et d'autres musiciens de jazz pour
un album intitulé Northern lights, ou les reels prennent une coloration
inhabituelle.
Autre tête d'affiche, Simon Thoumire est un musicien écossais
et autodidacte. Après avoir débuté avec le groupe
Seannachie, il s’est lancé dans une carrière solo ou avec
diverses formations. Son style très particulier est pratiquement
impossible à reproduire.
A écouter : avec David Milligan au piano : the big day in –
Foot Stompin FSR1713
Parmi les rares utilisateurs de l’english concertina vivant en Irlande, Charles O’Connor s’est distingué au sein du groupe folk rock Horslips, dans les années 80. Le concertina a d’abord servi de déco à la pochette de leur premier disque. Puis à l’occasion d’un disque qu’on qualifierait aujourd’hui d’ »unplugged » il a distillé quelques jolis tunes parmi lesquels une jig en trois parties tirée du O’Neil, the Crabbs in the Skillet.
Parmi les utilisateurs notables de l’english vous trouverez outre-atlantique,
George Marshall, du groupe Wild Asparagus. Les musiciens de cette formation
utilisent un répertoire à dominante irlandaise pour des contra
dances. Leurs galettes méritent bien quelques dollars.
À écouter : Wild asparagus – from the floor up - WA005
Coté îles britanniques citons encore Steve Turner, Martin Bradley, Robert Harbron , Dick Miles; les écossais Norman Chalmers du groupe Jock Tamson's Bairns, Stuart Eydman des Whistlebinkies
Hors english system, les interprétations de morceaux irlandais se font plus rares. Les quelques 33 tours ou cassettes parus dans les années 80 n'ont, hélas, jamais été réédités au format CD.
Par chez nous, Emmanuel Pariselle utilise parcimonieusement le franglo sur ses dernières productions discographiques. Ecoutez les deux hornpipes « Humours of Tullycrine » et Mickey Callaghan's sur le CD Oliver & Pariselle – danse sdu sud ouest et autres mondes.
Quelques english. De gauche à droite: tenor Colin Dipper, baryton-basse
Lachenal et tenor-treble Wheatstone
Liens:
Wild Asparagus: http://www.wildasparagus.com/
Simon Thoumire: http://www.simonthoumire.com/
Robert Harbron: http://www.robertharbron.co.uk/
Retour haut de page |
|
Dernière mise à jour : Novembre
2005
|